Présente dans nos cosmétiques, peintures, agrocarburants, produits alimentaires, l’huile de palme est célèbre. Mais savez-vous qu’elle est la première cause de déforestation ?
Excès des occidentaux, cause de la déforestation
Pour répondre à la demande croissante, les forêts sont détruites au détriment de plantations d’huile de palme. Au cours des deux derniers siècles, 90% des forêts malaisiennes et indonésiennes ont été détruites, en grande partie à cause de l’exploitation des palmiers à huile.
La production d’huile de palme n’a cessé de croitre pour répondre à une utilisation massive par les occidentaux. Entre 2015 et 2020 elle a augmenté de 19% :
Localisation du massacre des forêts
Le rapport sur l’huile de palme du WWF publié en 2021, classe l’Indonésie comme le premier pays producteur d’huile de palme (59%), suivie par la Malaisie (26%). Cependant pour répondre à une demande toujours plus forte, d’autres fronts de déforestation se dessinent : en Afrique et en Amérique Latine.
Huile de palme, pour quelles utilisations ?
L’huile de palme a trois principales utilisations :
- 66% : huile de cuisson, graisses, aliments transformés
- 22% : biocarburants. En France, nous avons deux filières : le bioétahnol et le biodiesel.
- 9% : industrie oléo chimique
Huile de palme, un désastre pour les indigènes et les animaux
Entre bénéfice économique et désastre humanitaire
L’huile de palme est source de bénéfices économiques et sociaux pour l’Indonésie et la Malaisie, selon le rapport sur l’huile de palme du WWF. Sa production permet de réduire la pauvreté par la création d’emplois. Ces emplois assurent des revenus pour environ 4,5 millions de personnes. Un témoignage d’un planteur à Sumatra en atteste :
Les revenus de l’huile de palme stimulent aussi les infrastructures rurales et l’économie locale. Ils ont permis entre autre de moderniser les moyens de transport, de durcir et élever les murs des habitations. Le travail nécessaire dans les plantations est réduit et encourage le développement d’emplois secondaires.
Cependant ces impacts positifs ne compensent pas les effets néfastes des palmiers à huile. Ils nécessitent des zones basses, chaudes et humides telles que les forêts tropicales et les tourbières pour se développer au mieux. Ces zones abritent plus des 2/3 de la biodiversité mondiale dont des communautés indigènes. Ces indigènes vivent et dépendent de ces forêts, elles leur apportent nourriture, logement, énergie, médicaments et revenus. Le cas le plus dramatique est celui de la tribu des Orang Rimba.
Quand la déforestation oblige des tribus à fuir et à se tourner vers l'Islam
Les Orang Rimba (« Gens de la forêt ») vivent en Indonésie dans la province de Jambi sur l’île de Sumatra. Ce peuple est contraint de modifier son mode de vie car les compagnies de plantation d’huile de palme continuent d’obtenir des concessions sur leurs terres. Ils sont ainsi chassés de leurs territoires ancestraux. De plus, en rasant les forêts, ils perdent leur terrain de chasse et de cueillette nécessaire à leur alimentation. Leurs sites sacrés sont aussi détruits et leurs croyances sont piétinées. Le gouvernement ne reconnait pas leurs droits coutumiers.
Pour échapper aux feux volontaires, à la fumée toxique, à la perte de leur habitat et pour survivre les Orang Rimba sont contraints de fuir et de se réfugier dans les villages alentours. Pour être acceptés au sein des communautés locales, ils sont contraints de se convertir à l’islamisme. Un article publié en 2017 de la BBC soulignait que 58 familles de la tribu Celitai des Orang Rimba ont été converties de force à l’islamisme et leur pratique de l’Islam est surveillée. Un témoignage issu d’un article de La Croix témoigne de cette situation :
L'huile de palme, responsable de l'extinction d'espèces animales
Le rapport sur l’huile de palme du WWF met en garde contre l’extinction de 5 grands mammifères menacés par la destruction de leur habitat au profit de palmiers à huile. Une plantation de palmiers à huile réduit d’environ 90% le taux de biodiversité par rapport à une forêt tropicale primaire.
La destruction des forêts au profit de palmiers à huile est ainsi responsable de la perte d’habitat et de nourriture pour de nombreuses espèces animales.
L’UICN classe les mammifères menacés en deux catégories :
1. Les espèces en danger critique d’extinction
2. Les espèces en danger d’extinction
Des artistes et militants dénoncent les ravages de la culture d’huile de palme en Indonésie :
Les entreprises, toutes coupables ?
Il existe un label RSPO (Roundtable on Sustainable Palm Oil) qui certifie que les entreprises privilégient une production d’huile de palme durable, c’est-à-dire économiquement viable, écologiquement appropriée et socialement bénéfique. De nombreux critères sont évalués sur toute la chaine de production. Il est donc tout à fait possible de produire une huile de palme durable.
Le WWF a mis en place une évaluation attestant des progrès et des performances de 227 grandes enseignes, industriels et entreprises hôtelières. Sa dernière évaluation est sortie en 2021. Sur 115 entreprises évaluées en 2020 et 2021, les indicateurs montrent que les acheteurs évoluent globalement vers la bonne direction :
Prenons quelques exemples détaillés d’entreprises connues :
1. Ferrero
L’entreprise se situe dans le top 10 des compagnies les plus performantes :
Effectivement depuis 2005 l’entreprise a investi dans la durabilité de son approvisionnement en huile de palme. Elle est reconnue pour la transparence de sa chaine d’approvisionnement : 99,7% de son huile de palme est traçable et pour ses efforts dans la lutte contre la déforestation.
Attention cependant, les bons résultats de l’entreprise ne concernent ici que l’huile de palme. Ils ne font pas état de l’impact environnemental de Ferrero pour ses autres besoins en matières premières comme le cacao, les noix de karité, le sucre, etc..
2. Lidl
L’entreprise se situe dans le top 25 des compagnies les plus performantes.
Quelles sont les ombres dans son tableau ?
- Tous les volumes d’huile de palme ne sont pas certifiés RSPO.
- Lidl n’oblige pas ses fournisseurs à acheter de l’huile de palme traçable.
- Lidl n’investit dans aucun projet sur le terrain. C’est-à-dire pas d’investissements dans des projets : avec les petits producteurs, de conservation de la biodiversité, de protection des forêts ou de reforestation, et pas d’approches juridiques ou paysagères.
3. McDonald’s
L’entreprise se situe dans le top 50 des compagnies les plus performantes.
Que reproche le WWF ?
- McDo utilise un type d’huile de palme non respectueux des droits humains
- Certains de ses fournisseurs ne respectent pas l’engagement de non-déforestation et les droits humains
- McDo n’oblige pas ses fournisseurs à traçer leur huile de palm
- McDo n’investit pas dans des projets sur le terrain
Le rapport du WWF ne traite que de la chaine d’approvisionnement de l’huile de palme et non du volume. Il serait intéressant de se poser la question en tant que consommateur de notre impact. En effet la production répond à une hausse croissante de la demande. Pour rappel, la consommation en 2020 était de 73 millions de tonnes et est estimée pour 2050 entre 264 et 447 millions de tonnes. Pour répondre à cette demande, il est évident qu’il faudra déforester. Êtes-vous prêts à changer votre façon de consommer ?
Que peut faire la société ?
Dans son rapport sur la déforestation importée publié en 2018, le WWF recommande des actions pour chaque acteur.
⇒ Les pouvoirs publics peuvent interdire les biocarburants de première génération, encourager des achats publics « zéro déforestation » et exiger des modes de production durables en nouant des partenariats diplomatiques avec les pays producteurs.
⇒ Les entreprises peuvent mettre en place des politiques d’approvisionnements qui répondent à des engagements comme le NDPE (No Deforestation, No Peat, No Exploitation). Elles peuvent aussi garantir la traçabilité des approvisionnements sur tout la filière. Et elles peuvent réduire l’utilisation d’huile de palme et favoriser une certification RSPO ou ISCC.
⇒ Et nous, en tant que consommateurs nous devons réduire notre consommation de produits transformés qui contiennent de l’huile de palme. Et dans la mesure du possible, nous devons favoriser des voitures ne roulant pas au diesel qui peut en contenir égalemment.
Que retenir ?
Production et consommation
L’huile de palme est la première cause de déforestation.
Les principaux pays producteurs sont l’Indonésie et la Malaisie et 90% de leurs forêts sont détruites.
La production d’huile de palme ne cesse de croitre: +19% entre 2015 et 2020. Estimation pour 2050 : entre +258% et +506% par rapport à 2020.
L’huile de palme est utilisée comme huile de cuisson, graisses, dans les biocarburants, dans l’industrie oléo chimique.
Impacts sociaux et environnementaux
L’huile de palme n’est pas innocente. Elle est responsable de la violation des libertés des indigènes, de la perte de leur culture et d’une conversion forcée à l’Islam.
Les animaux ne sont pas épargnés. De nombreuses espèces sont menacées d’extinction : tigre de Sumatra, Orang-Outan de Bornéo, etc.. Par ailleurs la perte immense du couvert forestier réduit l’absorption du carbone par les arbres entrainant la hausse du réchauffement climatique.
Notre devoir de consommateur
En tant que consommateur, nous devons exiger des entreprises qu’elles utilisent de l’huile de palme certifiée RSPO. Nous devons également réduire notre consommation d’huile de palme et n’utiliser qu’une huile certifiée.
Rédacteur : Tiphaine Bergot