La France ambitionne de devenir une terre d’accueil de l’innovation et des data center. Pourtant ces infrastructures du numérique consomment des quantités astronomiques d’énergie et posent de sérieux problèmes sur leurs impacts écologiques et sociaux.
Saviez-vous qu’un data center français peut consommer autant d’électricité qu’une ville comme Bordeaux ? Mais sans eux, pas d’internet. Utiliser ou retrouver un fichier, une photo, une information, partout et à tout moment, ce n’est pas de la magie. Pour avoir accès à vos données aussi facilement, toutes ces données sont stockées dans d’immenses bâtiments remplis de rangées d’ordinateurs sur plusieurs centaines de mètres de long.
Ces gigantesques infrastructures sont essentielles au stockage et au traitement du flux des données numériques du monde entier. Pour garantir leur fonctionnement, ces serveurs fonctionnent 24 h/24, 7 j/7, nécessitent une alimentation électrique constante et un refroidissement permanent pour éviter la surchauffe.
Un poids lourd pour la transition énergétique
Avec l’explosion des usages numériques et l’essor de l’intelligence artificielle, le volume des données à stocker ne cesse d’augmenter. Et depuis les attentats du 11 septembre 2001, la plupart des données sont sauvegardées en triple, ce qui accentue la pression sur les infrastructures.
Selon des projections, d’ici 2040, les data centers pourraient représenter un tiers de la consommation électrique en Île-de-France, mettant à mal les objectifs de neutralité carbone. Par exemple, le plus grand data center de France, situé à La Courneuve (Seine-Saint-Denis), consomme 1,1 térawattheure par an. Si l’on souhaite l’alimenter avec de l’énergie verte, il faudrait l’équivalent de 900 terrains de foot remplis de panneaux solaires. Une image peu flatteuse pour nos paysages.
La France souhaite construire davantage de méga-entrepôts, mais ces projets nécessitent de l’espace disponible, et pourrait augmenter l’artificialisation de terres agricoles. Les risques d’incendie sont aussi à prendre en compte, comme celui survenu en 2021 dans un data center de Strasbourg. La maintenance peut également poser problème en cas de surcharge électrique. Les groupes électrogènes de secours utilisés dans les data centers fonctionnent généralement au diesel ou au fioul, ce qui entraîne d’importantes émissions de CO₂ et de polluants atmosphériques, comme des particules fines et des oxydes d’azote. Ces polluants peuvent avoir des impacts locaux sur la qualité de l’air et la santé des populations des alentours.
Les data centers consomment environ 3 % de l’électricité totale en Europe, selon la Commission européenne. Et l’Agence internationale de l’énergie prévoit, quant à elle, un doublement de la consommation électrique mondiale liée aux data centers d’ici 2026.
Objectif 2050 ?
Ce décalage entre les ambitions économiques et les objectifs environnementaux suscite des tensions. Quand l’urgence est déjà de prioriser la décarbonation des usages énergétiques existants (chauffage, transport, etc.) pour atteindre les objectifs climatiques de 2050, le développement rapide des data centers semble aller à contre-courant de ces efforts.
L’Agence de la transition écologique (ADEME) a indiqué plusieurs pistes de réflexion pour limiter ces impacts : valoriser la chaleur issue des serveurs pour chauffer des foyers, alimenter des réseaux ou encore construire des data centers dans des friches urbaines pour éviter l’artificialisation des sols.