Au cœur des débats sur l’avenir énergétique, le nucléaire émerge en tant que protagoniste clé. Il porte le fardeau des espoirs de durabilité et des inquiétudes sécuritaires et environnementales. Entre les éloges de son potentiel de réduction des émissions de gaz à effet de serre et les inquiétudes persistantes quant à la gestion de ses déchets, le nucléaire se profile comme une solution complexe. Explications sur la controverse et les répercussions du nucléaire.
L’uranium en coulisse : un résumé énergique
La controverse et les répercussions du nucléaire sont comme des labyrinthes sans plan, on s’y perd. Préparez-vous à une plongée épique dans les mystères atomiques.
Le nucléaire, énergie non-renouvelable, nécessite un combustible star : l’uranium. En provenance principalement d’Australie (28%) et du Kazakhstan (15%) (Rapport IAEA et NEA (2020), c’est un élément chimique radioactif. Il est habillé de 3 isotopes dont la vedette est l’uranium 235, déclencheur de la fission énergétique. Malheureusement, sa teneur naturelle n’est que de 0,7% quand il faudrait atteindre un taux de 3% à 7%.
La fission, un véritable show atomique, est la rencontre entre un neutron et un noyau d’uranium 235. Elle libère une grande quantité d’énergie, rivalisant avec le pétrole (100g d’uranium = 1t de pétrole) comme solution énergétique pour combattre le réchauffement climatique.
Cependant, après le feu d’artifice, apparaissent les acteurs de l’ombre : les déchets nucléaires. Nous avons les actinides mineurs et les produits de fission. Le stockage de ces déchets pose des défis environnementaux tout comme l’extraction de l’uranium, sources de désastres écologiques et sociaux.
L’uranium : le dangereux bal radioactif de l’extraction minière
L’industrie minière est une actrice très discrète, et pourtant, il s’agit de la plus grosse productrice de déchets liquides, gazeux et solides. Elle déverse dans la nature des quantités astronomiques de substances toxiques : surtout des métaux, et des métalloïdes (Controverses minières – Pour en finir avec certaines contre vérités sur la mine et les filières minérales, Association Systext).
Mettons d’abord fin au mythe des « métaux rares » : tous les métaux sont rares à l’exception de l’aluminium, du manganèse, du magnésium, du fer et du titane. Cette rareté implique que les teneurs dans les gisements sont de l’ordre du pourcentage ou du dixième de pourcentage. Par ailleurs, l’uranium ne se trouve pas sous forme pure, c’est-à-dire qu’il est mélangé avec d’autres métaux. Chaque extraction se transforme alors en une véritable chasse au trésor radioactive.
La méthode d’extraction de prédilection, la « lixiviation in situ », consiste à injecter dans les sols de l’eau contenant une solution chimique pour dissoudre l’uranium présent dans la roche. Cette solution est ensuite pompée pour en extraire l’uranium à la surface.
En coulisse, la santé des travailleurs et des populations environnantes est mise en jeu avec une exposition à des doses élevées de rayonnement entraînant des cancers et autres maladies liées à la radioactivité.
Par ailleurs, l’extraction de l’uranium produit une quantité astronomique de déchets. Les déchets solides, appelés stériles miniers, dressent des montagnes de roches contaminées en surface. Ces derniers peuvent contenir des acteurs radioactifs tels que le radium ou le thorium. Les déchets liquides, rejets du traitement de l’uranium, déversent des substances radioactives et chimiques. Pour faire le tri entre le bon et le mauvais, on assiste à une symphonie de traitements : réservoirs d’évaporation, filtrage ou précipitation.
La gestion délicate de ces déchets, entre normes réglementaires et préoccupations communautaires, transforme chaque mine en défi. Les risques pour la santé et l’environnement sont une réalité bien documentée (La sécurité et la santé dans les mines à ciel ouvert. Recueil de directives pratiques du BIT Bureau international du Travail, Genève, 2018/ National stockpiles for radiological and nuclear emergencies: policy advice. Geneva: World Health Organization; 2023) notamment les risques de contamination de l’eau et des sols.
Les mines : des artistes de la pollution
Dans le grand cirque de l’extraction minière, l’eau joue le rôle principal, se chargeant en métaux et métalloïdes et s’acidifient lors de son exhaure (pompage des eaux souterraines en surface). Les déchets stériles et résidus, quant à eux, accueillent la pluie qui s’infiltre et repart chargée de produits toxiques, semant la pollution dans les nappes phréatiques.
Mais ce n’est pas tout ! Des déversements volontaires des eaux polluées ont lieu dans les rivières, lacs et mer, transformant ces étendues d’eau en galeries d’art toxiques. Parfois, les parcs à résidus miniers débordent, détruisant tout sur leur passage et laissant derrière eux un paysage désolé de boue et de pollution.
Et que dire des sols ? Les mines les polluent, détruisant la biodiversité et stérilisant les terres.
Enfin, pour couronner le tout, la pollution de l’air se joint à ce spectacle, libérant des poussières et des gaz toxiques lors des opérations de traitement du minerai.
Déchets, vous avez dit déchets ?
Notre planète jongle avec un problème brûlant : les célèbres déchets nucléaires. Nous avons principalement les matières valorisables (uranium 235, 238 et le plutonium) qui sont ré-enrichis dans le cycle du combustible ou recyclés sous forme de combustible MOX pour le plutonium. Cependant, tous ces acteurs ont une durée de vie limitée et finissent par attendre dans des piscines pour leur prochain acte.
Mais le spectacle nucléaire ne s’arrête pas là. Les déchets ultimes, moins nombreux que les matières valorisables, sont cependant les vraies célébrités car les plus radioactifs. Ils comprennent les produits de fission et les actinides mineurs.
Dans tout ce feu d’artifice radioactif, n’oublions pas des déchets moins connus mais radioactifs. Ce sont les matériaux issus du démantèlement d’installations nucléaires, des éléments radioactifs à usage industriel ou médical (imagerie, radiothérapie), etc.
Les coulisses du nucléaire : traitement et stockage des déchets radioactifs
Plongeons dans l’univers du traitement et du stockage des déchets radioactifs.
Tout commence dans des piscines de refroidissement pour 3 ans où nos déchets perdent en radioactivité. Ensuite, les déchets sont traités selon une classification en 5 catégories en fonction de leur degré de radioactivité.
On commence avec les déchets HA, les plus radioactifs (96%) mais les moins nombreux (0,2%). Ils sont brûlés, réduits en poudre noire et mélangés dans une pâte de verre en fusion. Puis, ils sont coulés dans des conteneurs en inox stockés dans des puits ventilés.
Puis viennent les déchets MA-VL (4% radioactivité / 3% du volume). Ils prennent la forme de galettes insérées dans des colis en béton ou métal puis stockés dans des puits.
Ensuite, nous avons les FA-VL (0,01% radioactivité / 7% du volume) qui sont stockés dans des conteneurs métalliques sur leur lieu de production. Puis viennent les FMA-VC (0,02% radioactivité / 63% du volume), confinés dans des colis en métal ou béton au centre de stockage dans l’Aube. Et enfin les petites dernières, les TFA (0,01% de radioactivité / 27% du volume) qui rejoignent les FMA dans l’Aube dans des sacs en tissus ou dans des colis métalliques.
Les débats autour du nucléaire ont leur lot de soucis, notamment la question épineuse du stockage des déchets et de leur impact sur l’environnement. Mais que se passe-t-il réellement ?
L’ANDRA assure dans son rapport de 2022, que 90% des déchets ont trouvé leur place ultime dans des centres spéciaux en surface dans l’Aube. Ces déchets TFA et FMA-VC, les moins radioactifs, ont une radioactivité proche de la normale. Ils ont aussi un statut de « sans danger » après seulement 300 ans.
Pour les déchets FA-VL, c’est une autre histoire. Ils attendent encore leur destination ultime, car leur radioactivité peut persister pendant des centaines de milliers d’années. L’ANDRA songe à créer un site de stockage de faible profondeur, car ces déchets très radioactifs ne peuvent pas rester en surface. La gestion durable de ces déchets reste une énigme, surtout si les sites de production n’ont pas la capacité nécessaire.
Les déchets MA-VL et HA, les stars de la radioactivité, n’ont pas non plus de plan de stockage final. Leur radioactivité peut perdurer pendant des centaines de milliers d’années. L’ANDRA a dans ses cartons un projet appelé Cigéo. C’est une sorte de ville souterraine à 500 mètres de profondeur dans de l’argile. Elle est située entre la Meuse et la Haute Marne. Pourquoi l’argile ? Parce qu’elle est la superstar du confinement, stable depuis des millions d’années. Elle est quasi imperméable, et résistante aux secousses sismiques, à l’érosion, et aux glaciations.
Et la sécurité ?
Après avoir été enfermés, les déchets, dans des colis en inox, sont insérés dans des conteneurs en acier ou en béton. Ils sont ensuite entreposés dans des galeries avec des revêtements en acier ou en béton à 500 mètres de profondeur. Le site sera par la suite définitivement fermé en 2150. Il ne traitera que les déchets des installations existantes ou déjà autorisées comme Iter. Une surveillance est prévue sur 500 ans.
Il est important de noter que les matériaux vont progressivement se dégrader. En effet, un conteneur en acier a une durée de vie d’environ 500 ans, là où le verre plusieurs milliers d’années. Une fois les matériaux entièrement dégradés, les déchets vont se répandre dans l’argile. Mais grâce à ses propriétés de confinement, l’argile va les piéger et les ralentir. Ils mettront des milliers d’années à remonter à la surface, en quantité infime. Mais surtout avec un niveau de radioactivité inférieur à la radioactivité naturelle.
Ce type de projet à l’étude est nécessaire, car, actuellement ces déchets sont entreposés en surface. Certes de façon sécurisée, mais non-durable sur le long terme. En effet, les installations ne sont pas pérennes et vont se dégrader. De plus, personne ne peut prédire quelle sera la surveillance de ces sites dans une centaine d’années.
Rédactrice : Tiphaine Bergot