Actualités

Au cœur du Sud-Liban, une vie entre exil et résilience.

Naqoura et Aalma el Chaeb : des villages défigurés par la guerre. Depuis octobre, le sud du Liban est le théâtre de bombardements israéliens, forçant près de 100 000 personnes à fuir leurs maisons. Nous avons rencontré Thouraya, Amal et Milad qui vivent toujours près de la frontière malgré les bombardements réguliers. On vous raconte.

Se promener aujourd’hui dans les rues de  Naqoura, seul le silence brisé par les échos des frappes aériennes y réside. La ville est quasiment déserte. Les bâtiments y sont en ruines. Alors que Netanyahou poursuit son génocide à Gaza, les tensions à la frontière entre le Liban et Israël s’aggravent et les craintes du guerre totale se font de plus en plus ressentir. En Israël, environ 60 000 personnes ont quitté le nord de manière préventive.  Au Liban, ce sont près de 100 000 personnes qui ont dû fuir les bombardements depuis le mois d’octobre. 

Une vie suspendue entre l’exode et reconstruction 

Sur la route, parmi les déplacés, nous avons fait la rencontre de Thouraya, une bergère octogénaire. Elle incarne la résilience des populations locales.  Venue de Dhayra,  depuis 9 mois elle vit en exil forcé sur ces dunes désertes avec son troupeau. Depuis 9 mois elle porte la seule et même tenue emportée avec elle. “  Je les ai lavés et remis; on a tout laissé derrière nous », confie-t-elle. « Mais nous n’avons pas peur des bombardements.  Que craindre ? Nous ne mourrons qu’une seule fois. Chaque jour, nous espérons rentrer. Cela fait neuf mois, et nous sommes toujours là. »

Dans les collines voisines, se trouve le village chrétien d’Aalma el Chaeb, situé à un kilomètre de la frontière israélienne. Sur les 900 habitants, eux aussi ont payé un lourd tribut. Seuls une centaine ont choisi de rester, malgré les risques quotidiens. Parmi eux, un couple déterminé à reconstruire leur maison dans ce qui reste de leur quartier. « Si on perd tout, on reconstruit. Et si on perd encore, on reconstruira encore, c’est comme ça le Liban. Que veux-tu faire ? Abandonner mon village et partir ? 

 » s’interroge  Amal avec un sourire empreint de courage. Pour lui et sa femme abandonner leur village n’est pas une option. Cette maison leur appartient, c’est chez eux. Sa femme s’écrit en riant : “pas reconstruire ? Bien sûr,on reconstruit. On s’apprête à poser les tuiles !” 

Milad, leur voisin, nous livre aussi son histoire. Son champ d’avocat à été complètement détruit à la suite d’une frappe israélienne en février 2024.  Depuis, il s’est équipé en tank d’eau dans le cas où un nouvel incendie se déclenche et  lui aussi refuse de quitter sa maison. “Un jour je suis allée à Saïda et le temps que je revienne tout était bombardé. Avant j’allais souvent dans mon champ tous les jours avec mes ouvriers, “ raconte Milad. La main tendue vers l’horizon encore fumant il continue : “il y a environ 30 maisons et par ici il y a eu des incendies. Tous les oliviers , les  vignes… toutes nos sources de revenus ont brûlé. C’était ma source de revenu, pour moi et ma famille. Mais je rêve de pouvoir y retourner, pour rebâtir ce qui peut l’être. »

Un conflit aux ramifications incertaines

La situation dans la région ne cesse de se détériorer. Les affrontements entre le Hezbollah et Israël se sont intensifiés. Au lendemain du 7 octobre 2023, le Hezbollah lance une attaque sur des territoires contestés en Israël, en soutien au Hamas et au peuple palestinien. Israël riposte alors sur le Sud-Liban en visant des cibles militaires du Hezbollah.  Au total, plus de 7800 attaques ont été recensées. Environ 1400 frappes du Hezbollah en territoire israélien et près de 6500 attaques israéliennes sur le territoire libanais. Les pertes humaines sont lourdes : 500 morts au Liban, dont 100 civils et plus de 1400 blessés. Côté israélien,  on dénombre près de 40 morts, dont 20 civils et une trentaine de blessés. 

Assis sur son canapé, Milad nous invite à prendre le thé et n’hésite pas à nous confier ses interrogations et ses inquiétudes sur la situation : “ les gens n’ont plus d’argent, ils sont déplacés. Personne ne se soucie de nous. Où est notre gouvernement ? Que fait-il pour son peuple ? Qui se soucie de nous ? demandez leur, ils vous diront que les gens du sud sont immunisés”, déplore Milad. 

Vers une escalade irréversible ?

Alors que les tensions montent, les habitants du Sud-Liban continuent de vivre entre espoir et désespoir. Pour eux, la guerre n’est pas seulement une affaire de politique internationale, mais une réalité quotidienne. Entre les ruines et les champs brûlés, la vie continue, portée par une résilience.  

Dans cette région à bout de souffle, la question reste en suspens : Comment la situation peut-elle évoluer ?  l’armée israélienne a approuvé et validé des plans pour une potentielle offensive terrestre au Liban.Le Hezbollah lui a déclaré qu’il ne souhaitait pas une guerre totale, mais qu’il y était prêt s’il était imposé au Liban. L’émissaire américain Amos Hochstein , envoyée spéciale de la Maison-Blanche, s’est rendue à Beyrouth le mois dernier pour essayer d’apaiser les tensions. Il a déclaré préférer la voie diplomatique pour résoudre le conflit. Hassan Nasrallah, le leader du Hezbollah, a en effet déclaré qu’il arrêterait d’attaquer Israël si un accord pour un cessez-le-feu permanent était signé à Gaza. 

Ce samedi 27 juillet 1 frappe a touché al-Cham, une ville située sur le plateau du Golan, en territoire syrien occupé par Israël. Douze enfants ont été tués. l’Armée israélienne accuse le Hezbollah promettant des représailles importantes, mais ce dernier dément être l’auteur de la frappe. Alors que la communauté internationale tente de limiter l’embrasement, la région pourrait être sur le point de basculer.

Alexandra Henry

Quitter la version mobile